La contestation de l'opposition du procureur de la République à la demande de changement de prénom : requête ou assignation ?
Résumé : la procédure de changement de prénom devant le juge aux affaires familiales (JAF) relève de la procédure contentieuse et non plus gracieuse dès lors qu'elle intervient après un refus du ministère public. Par conséquent, la saisine du JAF doit être, sous peine d'irrecevabilité, faite par voie d'assignation et non par voie de requête (Cour d'appel de Montpellier, 28 mars 2024, 22/02257).
Par une requête, une femme, née en 1966 en Algérie, a saisi un juge aux affaires familiales afin de solliciter le changement de son prénom après l'opposition du procureur de la République de Béziers.
Le juge aux affaires familiales a déclaré irrecevable la demande de changement de prénom, car la saisine du juge aux affaires familiales a été introduite par voie de requête et non par voie d'assignation.
L'intéressée a interjeté appel qui sera rejeté par la Cour d'appel de Montpellier par arrêt du 28 mars 2024.
Le droit au changement de prénom pour intérêt légitime
En effet, en vertu de l'article 60 du code civil, toute personne peut demander à l'officier de l'état civil à changer de prénom. La demande est remise à l'officier de l'état civil du lieu de résidence ou du lieu où l'acte de naissance a été dressé.
L'adjonction, la suppression ou la modification de l'ordre des prénoms peut également être demandée.
La décision de changement de prénom est inscrite sur le registre de l'état civil.
S'il estime que la demande ne revêt pas un intérêt légitime, en particulier lorsqu'elle est contraire à l'intérêt de l'enfant ou aux droits des tiers à voir protéger leur nom de famille, l'officier de l'état civil saisit sans délai le procureur de la République. Il en informe le demandeur. Si le procureur de la République s'oppose à ce changement, le demandeur, ou son représentant légal, peut alors saisir le juge aux affaires familiales.
La procédure contentieuse du changement de prénom après l'opposition du procureur de la République
L'article 1055-2 du code de procédure civile énonce que lorsque le procureur de la République s'oppose au changement de prénom en application des dispositions du dernier alinéa de l'article 60 du code civil, la demande est portée contre lui devant le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire auprès duquel le procureur de la République exerce ses fonctions.
L'article 1055-3 du même code ajoute que les demandes formées en application des dispositions du troisième alinéa de l'article 57 et du dernier alinéa de l'article 60 du code civil obéissent aux règles de la procédure écrite ordinaire applicable devant le tribunal judiciaire.
Si l'article 60 du code civil confère à l'officier de l'état civil la compétence en matière de changement de prénom, le juge aux affaires familiales demeure compétent en cas de contentieux et la procédure obéit aux dispositions issues de l'article 2 du décret no 2017-450 du 29 mars 2017.
Dès lors, la procédure de changement de prénom devant le juge aux affaires familiales relève désormais de la procédure contentieuse et non plus gracieuse, puisqu'elle intervient après un refus du procureur de la République.
La demande ne peut être portée devant le juge aux affaires familiales qu'à la suite de la notification de la décision d'opposition du procureur de la République au changement de prénom et la procédure obéit aux règles de la procédure contentieuse. La demande doit donc être formée par voie d'assignation à l'encontre du procureur de la République en application de l'article 750 du code de procédure civile.