Vente ou cession d'un fonds de commerce
Le fonds de commerce est un ensemble des biens corporels et incorporels d'un commerçant. Il peut être, comme tout bien, vendu à un tiers. La vente d'un fonds de commerce est un acte important. Les enjeux juridiques et financiers sont élevés. Parfois, il s'agit d'une opération à risque pour l'acheteur (acquéreur). Par ailleurs, la loi prévoit certaines formalités juridiques devant être accomplies après la vente du fonds de commerce.
L'acte de vente d'un fonds de commerce
Modification par la loi du 19 juillet 2019 La Loi n° 2019-744 du 19 juillet 2019 de simplification, de clarification et d'actualisation du droit des sociétés a abrogé l'article L141-1 du code de commerce qui prévoyait l'obligation pour le vendeur d'un fonds de commerce d'énoncer certaines informations obligatoires. Ainsi, le contenu de cette SECTION consacrée à l'acte de vente d'un fonds de commerce est obsolète suite à cette modification législative.
La vente d'un fonds de commerce doit être concrétisée par un écrit. La question qui se pose est de savoir qui a la qualité pour rédiger cet acte. Faut-il obligatoirement faire appel à un notaire ? La rédaction d'acte de vente d'un fonds de commerce par un notaire n'est pas obligatoire. Il peut être rédigé sous forme d'acte sous seing privé. C'est-à-dire que les parties (vendeur et acquéreur) peuvent rédiger leur propre acte de vente. Cependant, il est recommandé de se faire accompagner par un professionnel (avocat, expert comptable, notaire) afin de bénéficier d'un conseil juridique éclairé, dans la mesure où la vente d'un fonds de commerce est une opération complexe.
Si vous décidez de rédiger l'acte de vente du fonds de commerce vous-même, il est important de noter qu'il existe certaines mentions obligatoires expliquées ci-dessous.
Les mentions obligatoires de l'acte de vente d'un fonds de commerce
Au cas où le vendeur a lui-même acheté le fonds de commerce faisant l’objet de la (re)vente, il doit énoncer :
- le nom du précédent vendeur,
- la date et la nature de l’acte d’acquisition – s’agissant de l’acte authentique, de l’acte sous seing privé ou d’absence d’acte -,
- et le prix de l’acquisition pour les éléments incorporels, le matériel et les marchandises.
L'état de privilège et de nantissement grevant le fonds de commerce
Le vendeur du fonds de commerce doit ensuite mentionner l’état des privilèges et nantissements grevant le fonds. Il faut faire l’état du droit de préférence et du droit de suite.
Les informations sur le chiffre d'affaires et le résultat d'exploitation du fonds de commerce
Le vendeur du fonds de commerce doit fournir à l’acheteur des informations sur la performance économique du fonds cédé. Le chiffre d’affaires et le résultat d’exploitation du vendeur doivent être communiqués pour les trois derniers exercices comptables ou le cas échéant, pour la durée de la possession du fonds si elle est inférieure à trois ans.
Il convient de préciser que le résultat d’exploitation est la différence entre le bénéfice d’exploitation et la perte/charge d’exploitation.
La jurisprudence s’est montrée exigeante pour déterminer si cette mention est satisfaite. Elle a notamment jugé insuffisante la déclaration par laquelle l’acquéreur affirme avoir pris connaissance du chiffre d’affaires et des résultats commerciaux des trois dernières années. Les informations relatives aux résultats doivent figurer dans l’acte même. Ainsi, la mention de ces résultats sur une feuille séparée n’est pas suffisante.
Les informations sur le bail
Enfin, le vendeur doit indiquer les informations relatives au bail (date, durée, nom et adresse du bailleur et du cédant). Pour certaines activités, le lieu de l’exercice de l’activité a une importance particulière pour la réussite commerciale.
La sanction en cas de non-respect des mentions obligatoires
En cas de non-respect des mentions obligatoires dans l’acte de vente d’un fonds de commerce, la sanction est la nullité de l’acte de vente du fonds de commerce.
Cependant, il s’agit que d’une nullité facultative, car le juge peut écarter la nullité en accordant simplement la réparation du préjudice si l’omission des mentions obligatoires n’avait pas trompé l’acquéreur et vicié son consentement. Par exemple, la jurisprudence a admis la nullité lorsqu’un acquéreur n’a pas pu déterminer les résultats de l’activité du fonds de commerce sur la base des documents fournis. En revanche, si l’acquéreur connaissait la valeur du fonds, l’omission de la mention sur la valeur du fonds n’entraîne pas la nullité l’acte de vente.
En cas de vice de consentement, la nullité peut aussi être demandée dans les conditions du droit commun des contrats.
Seul l’acheteur peut demander la nullité de l’acte de cession d’un fonds de commerce dans le délai de 12 mois, à partir de la signature de l’acte.
Les formalités après la vente d'un fonds de commerce
Il existe deux formalités importantes à effectuer après la vente d’un fonds de commerce.
L’enregistrement de la vente d’un fonds de commerce
L’acte de vente du fonds de commerce doit faire l’objet d’enregistrement, sauf s’il a été rédigé par un notaire. L’enregistrement de l’acte de vente doit s’effectuer à la diligence de l’acheteur. L’acte de vente du fonds de commerce doit être enregistré au service des impôts du lieu où se trouve le fonds de commerce vendu. L’acheteur dispose d’un mois à compter de la vente du fonds de commerce pour effectuer l’enregistrement.
Cet enregistrement est nécessaire pour pouvoir valablement effectuer la publicité légale que nous allons expliquer ci-dessous.
La publicité légale de la vente d’un fonds de commerce
Après l’étape de l’enregistrement, il faut procéder à la publicité légale.
Afin de protéger les créancier du vendeur du fonds de commerce, la loi impose la publicité de la vente du fonds. Le but est d’informer les créanciers du vendeur de la vente du fonds de leur débiteur.
C’est l’acheteur qui doit avoir la diligence de procéder à la publication de la vente du fonds de commerce.
La vente du fonds de commerce doit être publiée à la fois :
- dans un journal d’annonces légales habilité (sous forme d’extrait ou d’avis)
- et dans un bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC).
Ces deux annonces peuvent être publiées en même temps.
Dans les 10 jours à compter de la publication au BODACC, les créanciers du vendeur du fonds peuvent exercer le droit d’opposition au paiement du prix. Ils envoient un acte d’huissier ou une lettre recommandée à l’acheteur du fonds. Cette opposition évite que le prix ne soit versé directement au vendeur. De la sorte, le prix sera réparti entre les créanciers.
Ces annonces doivent être faites dans les 15 jours à compter de la date de la vente du fonds de commerce.
La formalité en cas de vente d'un fonds de commerce avec paiement du prix à terme
En cas de vente avec paiement du prix à terme, il est obligatoire de procéder à l’inscription du privilège du vendeur et du nantissement dans un délai de 30 jours après la signature de l’acte de vente. Il s’agit d’effectuer auprès du greffe du tribunal de commerce du lieu du fonds vendu, un dépôt :
- de l’acte de vente enregistré
- de 2 bordereaux du privilège du vendeur et/ou du privilège du nantissement.
La vente d'un fonds de commerce : droit de préemption de la commune
Lors de la cession ou de la vente d’un fonds de commerce, la commune dans laquelle se trouve le fonds à vendre bénéficie d’un droit de préemption.
Qu’est-ce que le droit de préemption de la commune ?
Concrètement, la commune peut fixer un périmètre de sauvegarde du commerce et de l’artisanat de proximité. Si un fonds de commerce se situe dans cette zone de protection, la commune a le droit, en cas de vente, d’acheter ce fonds avant les autres personnes. C’est ce que l’on appelle le droit de préemption.
L’obligation du vendeur du fonds de commerce situé dans la zone de protection d’effectuer une déclaration préalable
En cas de cession d’un fonds de commerce se trouvant à l’intérieur d’une zone de sauvegarde déterminée par la commune, le vendeur doit effectuer une déclaration préalable à la commune. A défaut, l’acte de vente ne sera pas valable.
Cette déclaration préalable précise :
- le prix,
- l’activité de l’acquéreur pressenti
- le nombre de salariés du vendeur et la nature de leur contrat de travail
- les conditions de la cession.
- le bail commercial, le cas échéant
- le chiffre d’affaires.
Les possibilités pour la commune
La commune a plusieurs possibilités pour agir.
- La commune dispose de 2 mois à compter de la réception de cette déclaration préalable pour exercer son droit de préemption. Dans ce cas, elle peut acheter le fonds au prix proposé dans la déclaration préalable ou à un prix fixé par le juge (en cas de désaccord sur le prix). En cas d’achat, l’acte de vente doit être fait dans le délai de 3 mois. La commune pourra ensuite exploiter le fonds ou le mettre en location-gérance.
- La commune peut décider de ne pas acheter le fonds à vendre.
- En cas de silence, il vaut renonciation. Le vendeur pourra donc réaliser la vente aux prix et conditions figurant dans sa déclaration préalable.
L’obligation pour la commune de rétrocéder le fonds de commerce acheté
La loi oblige la commune à rétrocéder le fonds de commerce qu’elle a acheté dans le délai de 2 ans à compter de la vente, dans le but de préserver la diversité et à promouvoir le développement de l’activité commerciale et artisanale dans le périmètre concerné.
Si la commune a mis le fonds acheté en location-gérance, elle dispose de 3 ans (au lieu de 2 ans) pour le rétrocéder.
La vente d'un fonds de commerce : information des salariés
En cas de vente du fonds de commerce, les salariés ont la possibilité, dans certaines conditions, de présenter une proposition d’achat. Le propriétaire du fonds de commerce a donc l’obligation de consulter les salariés de l’entreprise. L'information des salariés n'est pas obligatoire dans certains cas. (1) La vente du fonds de commerce à un conjoint, à un ascendant ou à un descendant ; (2) Les entreprises faisant l’objet d’une procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires ; (3) Si, au cours des douze mois qui précèdent la vente, celle-ci a déjà fait l’objet d’une information en application de l’article 18 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire.
Entreprises visées
Les entreprises visées par cette obligation sont :
- celles qui ne sont pas soumises à l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise (moins de 50 salariés);
- celle qui sont soumise à l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise.
Quand informer les salariés du projet de vente du fonds de commerce ?
Les salariés doivent être informés au plus tard 2 mois avant la cession du fonds de commerce. A cette occasion, un ou plusieurs salariés de l’entreprise ont la possibilité de présenter une offre pour l’acquisition du fonds de commerce.
Qui doit informer les salariés ?
- Dans l’hypothèse où le propriétaire du fonds de commerce n’exploite pas lui-même le fonds, il doit notifier à l’exploitant cette information. Le délai court à compter de la date de cette notification. A son tour, l’exploitant du fonds de commerce porte, sans attendre, à la connaissance des salariés cette notification, en les informant qu’ils peuvent lui présenter une offre d’achat. En cas de proposition faite par un ou des salariés, l’exploitant notifie sans attendre au propriétaire toute offre d’achat.
- Lorsque le propriétaire du fonds de commerce l’exploite lui-même, celui-ci notifie sa volonté de vendre directement aux salariés en les informant qu’ils peuvent lui présenter une offre d’achat. Le délai court à compter de la date de cette notification.
La vente du fonds de commercer avant l'expiration du délai de 2 mois
La cession du fonds de commerce à une personne extérieure peut intervenir avant l’expiration du délai de 2 mois à partir du moment où chaque salarié a fait connaître sa décision de ne pas présenter d’offre.
L'assistance des salariés
Les salariés peuvent demander à se faire assister par un représentant de la chambre de commerce et de l’industrie régionale, de la chambre régionale d’agriculture, de la chambre régionale de métiers et de l’artisanat territorialement compétentes en lien avec les chambres régionales de l’économie sociale et solidaire et par toute personne désignée par les salariés, dans des conditions définies par décret.
Les modalités d'information des salariés
L’information des salariés peut être effectuée par tout moyen, de nature à rendre certaine la date de sa réception par ces derniers. Lorsque l’information est faite par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, la date de réception de l’information est la date de la première présentation de la lettre par le facteur.
REFERENCES JURIDIQUES
CODE DE COMMERCE
- articles L141-1 et suivants
- articles L141-23 et suivants
CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS
- articles 638 et 653
CODE DE L'URBANISME
- article L214-1