Méthodologie juridique

La méthode de la rédaction de la fiche d'arrêt de la Cour de cassation

Rédiger une fiche d'arrêt est une compétence essentielle pour tout étudiant commençant les études de droit en France. La fiche d'arrêt permet aux étudiants de se familiariser avec les décisions de justice, en particulier celles rendues par la Cour de cassation.

Dans cet article, nous vous expliquerons comment rédiger une fiche d'arrêt de manière claire et rigoureuse. Nous aborderons également les erreurs courantes à éviter et donnerons des conseils pour vous aider à réussir cet exercice important.

Qu'est-ce qu'une fiche d'arrêt ? 


Une fiche d'arrêt est une synthèse organisée d'une décision judiciaire, généralement rendue par la Cour de cassation, mais cela peut également concerner d'autres juridictions. 

La rédaction de la fiche d'arrêt permet aux étudiants de comprendre :

  • l'histoire judicaire d'une affaire
  • les règles applicables
  • la solution retenue. 

L'exercice de fiche d'arrêt vous permet également d'améliorer votre compréhension du droit positif et de renforcer vos capacités à synthétiser des informations complexes.

Structure type d'une fiche d'arrêt de la Cour de cassation



La fiche d'arrêt de la Cour de cassation est structurée en plusieurs parties distinctes et logiques, qui doivent être respectées scrupuleusement pour rendre votre travail efficace.

  • Le titre ou l'identification de l'arrêt
  • Le résumé des faits
  • La procédure (y compris les prétentions des parties
  • Le problème de droit
  • La solution (y compris le raisonnement de la Cour de cassation)

Comment rédiger chaque partie d'une fiche d'arrêt ?

Etape 1 : Le titre ou l'identification de l'arrêt

La fiche d'arrêt commence par l'identification de l'arrêt sur lequel l'on va travailler. Il faut préciser certaines informations :

  • L'auteur de la décision (quelle chambre de la Cour de cassation ?)
  • La date de la décision
  • La nature de la décision (arrêt de rejet ou arrêt de cassation)
  • Sur quoi porte l'arrêt en quelques mots sans entrer dans le détail.

Etape 2 : Le résumé des faits à rédiger dans la fiche d'arrêt


Le résumé des faits consiste à rappeler seulement les éléments factuels de l’affaire qui ont conduit les parties devant les tribunaux. Cette partie doit répondre à la question : Que s’est-il passé ?

Conseil : Ne surabondez pas d'informations. Mentionnez uniquement les faits pertinents qui ont un lien direct avec le problème de droit soulevé. Trop de détails peuvent embrouiller la compréhension. Par ailleurs, il ne faut pas parler de l'acte introductif d'instance qui relève de la procédure.

Etape3 : La procédure

Cette section présente l'historique procédural de l'affaire. On explique également les prétentions des parties.

Vous devez indiquer les différentes décisions rendues par les juridictions avant que l'affaire ne parvienne devant la Cour de cassation.

En principe, la procédure comporte trois étapes. Mais dans des cas exceptionnels, elle comporte seulement deux étapes.

Certaines expressions utilisées dans l'arrêt faisant l'objet de la fiche peuvent vous aider à identifier le nombre d'étapes de la procédure.

Si vous constatez l'expression "arrêt attaqué" dans la décision faisant l'objet de la fiche d'arrêt, la procédure comporte trois étapes (c'est le cas général) :

  • la procédure initiée par un acte introductif d'instance devant un tribunal du premier degré
  • la procédure initiée par un appel devant une cour d'appel
  • la procédure initiée par un pourvoi devant la Cour de cassation.

Si vous constatez l'expression "jugement attaqué" dans la décision faisant l'objet de la fiche d'arrêt, la procédure comporte deux étapes (c'est le cas d'exception) :

  • la procédure initiée par un acte introductif d'instance devant un tribunal du premier degré
  • la procédure initiée par un appel devant une cour d'appel
  • la procédure initiée par un pourvoi devant la Cour de cassation.


Conseil : Soyez précis. Distinguez bien les décisions des différentes instances, et surtout, ne mélangez pas cette partie avec les faits.

La procédure initiée par un acte introductif d'instance devant un tribunal du premier degré

 

Dans cette partie, vous rédigez un paragraphe de sorte que l'on puisse trouver les informations suivantes :

  • Qui est le demandeur ?
  • Quel est l'objet de sa demande ?
  • L'action en justice est intentée contre qui ?
  • Quel est le tribunal saisi ?
  • Quelle est la solution retenue par le tribunal saisi ? Pour quel motif ? 

    Conseil : Soyez clair dans l'exposition des demandes, car elles orientent le problème juridique de l'affaire. Par ailleurs, certaines informations peuvent être absentes de l'arrêt. Et cela arrive souvent. Par exemple, il n'est pas précisé quel tribunal a été saisi. Dans ce cas, on peut rédiger "le tribunal du premier degré est inconnu". 

 

La procédure initiée par un appel devant une cour d'appel

Dans cette partie, vous rédigez un paragraphe de sorte que l'on puisse trouver les informations suivantes :

  • Qui interjette appel ? Il est possible que dans certains cas, l'on ne sait pas qui interjette appel. Dans ce cas, on peut rédiger "un appel a été interjeté". 
  • Devant quelle Cour d'appel ?

Quelle est la solution retenue par la Cour d'appel saisie ? Quel motif ?

La procédure initiée par un pourvoi devant la Cour de cassation

Dans cette partie, vous rédigez un paragraphe de sorte que l'on puisse trouver les informations suivantes :

  • Qui forme le pourvoi en cassation ?
  • Quel est le moyen du demandeur au pourvoi (arguments) ? Généralement, dans les arrêts de cassation rendus avant 2019, le moyen du demandeur au pourvoi n'est pas rappelé. Donc, on peut rédiger "le moyen est inconnu". En revanche, les arrêts de rejet rappellent toujours le moyen du demandeur au pourvoi.

Etape 4 : Le problème de droit à rédiger dans la fiche d'arrêt


Le problème de droit constitue le cœur de votre fiche d'arrêt. C'est l'étape la plus difficile de la fiche d'arrêt.

Le question de droit dans la fiche d'arrêt est un question binaire qui se répond par oui ou par non. Il faut donc bannir les questions qui commencent par :

  • Dans quelle mesure
  • Dans quelles conditions
  • En quoi 
  • Pourquoi
  • Comment 

La question de droit est celle posée à la Cour de cassation. Puisque la Cour de cassation est le juge du droit, le problème de droit ne doit porter que sur le droit et ne doit pas porter sur les faits ou l'appréciation des faits.

Par exemple, les moqueries constituent-elles un motif légitime de changement de prénom ? ==> Cette question est une question de fait et non de droit. Car pour répondre à cette question, il convient d'examiner les faits particuliers de l'affaire. Les moqueries relèvent des faits matériels et non du droit.

Le problème de droit doit être formulé de façon claire et précise et en termes juridiques. Il doit être abstrait et relativement général. Il ne s'adresse pas à une personne en particulier.

Par exemple, Monsieur MACON peut-il changer de prénom en cas d'intérêt légitime ? ==> Cette question n'est pas abstraite et générale. Il faut supprimer "Monsieur MACON" et le remplacer par "une personne". 

Conseil : Le problème de droit doit refléter l'essentiel de l'arrêt et le débat devant la Cour de cassation. 


Etape 5 : La solution ou le raisonnement de la Cour de cassation



Ici, vous devez exposer la décision de la Cour de cassation et expliquer son raisonnement. S'il agit d'un arrêt de cassation, il convient de rappeler le visa et l'attendu de principe, le cas échéant. Indiquez si la Cour casse la décision attaquée ou rejette le pourvoi, et expliquez la logique juridique derrière sa décision.

Généralement, dans les arrêts de rejet, la Cour de cassation se retranche derrière l'appréciation souveraine des faits opérée par les précédents juges. La Cour de cassation n'a pas le pouvoir de contrôler l'appréciation des faits. Elle ne contrôle que le droit. Même si la Cour de cassation rappelle ce motif de fait (appréciation des faits) dans son motif, il ne faut pas dire que c'est la Cour de cassation qui a dit cela directement. Il faut expliquer de sorte que l'on puisse comprendre que ce motif de fait est celui des juges du fond rappelé par la Cour de cassation. 

Conseils pour réussir la fiche d'arrêt de la Cour de cassation



- Travaillez votre compréhension du droit : Avant de rédiger la fiche d'arrêt, assurez-vous de bien maîtriser les notions juridiques en jeu. Cela vous évitera de passer à côté de l'essentiel.
- Utilisez un langage juridique précis : La clarté est essentielle dans une fiche d'arrêt. Évitez les formulations trop vagues ou approximatives.
- Soyez synthétique : Une fiche d'arrêt n'est pas une dissertation. Allez à l'essentiel tout en respectant les différentes étapes de la méthode.
- Relisez-vous : Une fiche d'arrêt bien rédigée est exempte d'erreurs de formulation, de syntaxe ou de confusion dans l'ordre des informations. La relecture est primordiale.

Les erreurs à éviter dans la fiche d'arrêt



Voici quelques erreurs communes :

- Oublier des parties : La fiche d'arrêt doit suivre une structure bien définie. Omettre une section, par exemple, les prétentions des parties ou le problème de droit, est une faute grave.
- Mélanger les parties : Ne mélangez pas les faits et la procédure. Cette confusion est fréquente, mais elle rend la fiche illisible.
- Trop de détails : Soyez concis, en particulier dans l'énoncé des faits. Ne surchargez pas votre fiche d'informations superflues qui n'ont pas d'incidence sur la résolution du problème de droit.


Pour aller plus loin, vous pouvez également voir des exemples de rédaction des fiche d'arrêts de la Cour de cassation et des exemples de découpage de ces arrêts.