Les règles relatives au changement de nom de famille en droit français

En droit des personnes, les éléments d’identification des personnes physiques tels que les noms de famille sont soumis au principe d’immutabilité. Cependant, afin de répondre à certains besoins dans certaines situations particulières, le changement de nom de famille est exceptionnellement possible.
I - Le changement de nom de famille selon la nouvelle procédure simplifiée introduite par la loi du 2 mars 2022
L’article 2 de la loi du 2 mars 2022 modifie l’article 61-3-1 du Code civil en instaurant une procédure simplifiée de changement de nom de famille. Si la procédure est simplifiée, les choix du nouveau nom de famille offerts au demandeur sont cependant limités.
Les personnes pouvant bénéficier de la procédure simplifiée
La procédure simplifiée de changement de nom de famille est ouverture seulement aux personnes majeures. Ainsi, un ou deux parents ne sont pas autorisés à présenter une demande de changement de nom de famille de leur enfant mineur selon cette procédure.
Les choix limités du nouveau nom de famille
L’article 61-3-1, alinéa 1er du Code civil limite les choix du nouveau nom de famille aux noms de famille prévus aux premier et dernier alinéa de l’article 311-21 du Code civil, c’est-à-dire aux noms de la parentèle.
Les choix selon le premier alinéa de l’article 311-21 du Code civil : cela vise le nom du père, le nom de la mère, leurs deux noms accolés dans l’ordre choisi par le demandeur de changement de nom et dans la limite d’un nom pour chacun des parents.
Par exemple, Jean-Pierre est né de l’union entre Bernard DUMONT et Marie DURAND. Son acte de naissance indique qu’il s’appelle Jean-Pierre DUMONT. S’il souhaite, Jean-Pierre peut, selon la procédure simplifiée, demander le changement de son nom de famille en portant l’un des noms suivants : DURAND, DURAND DUMONT ou DUMONT DURAND.
Les choix selon le dernier alinéa de l'article 311-21 du Code civil : en cas de double nom d’un ou des parents, le demandeur de changement de nom a la possibilité de ne porter qu’une partie de l’un ou de l’autre de ces doubles noms.
Par exemple, Par exemple, Jean-Pierre est né de l’union entre Bernard DUMONT et Marie DURAND DUPONT. Son acte de naissance indique qu’il s’appelle Jean-Pierre DUMONT. S’il souhaite, Jean-Pierre peut, selon la procédure simplifiée, demander le changement de son nom de famille en portant l’un des noms suivants : DURAND DUPONT, DUMONT DURAND, DURAND DUMONT, DUMONT DUPONT, DUPONT DUMONT, DURAND, DUPONT.
La procédure simplifiée de changement de nom de famille
Le dépôt de la demande
La simplification de la procédure veut dire que la demande de changement de nom fondé sur l’article 61-3-1 du Code civil s’effectue directement auprès de l’officier de l’état civil dépositaire de l’acte de naissance ou du lieu de résidence et non plus auprès du Ministre de la Justice (changement de nom par décret è voir le changement de nom fondé sur l’intérêt légitime).
Contrairement au changement de nom de famille fondé sur l’intérêt légitime, aucune formalité préalable de publicité légale.
D’ailleurs, l’officier de l’état civil sollicité n’a pas le pouvoir de contrôler le caractère légitime du motif de la demande.
L’assistance d’un avocat n’est nullement obligatoire.
La demande peut être présentée par simple courrier accompagné des pièces justificatives. Il est à noter que les pièces d’état civil doivent être apportées en original.
Sans préjudice de l'article 61 du Code civil, le choix de modification du nom de famille selon la procédure simplifiée ne peut être fait qu'une seule fois. Cela veut dire qu’une personne ayant changé de nom de famille selon la procédure simplifiée pourrait de nouveau présenter une nouvelle demande de changement de nom fondé sur l’intérêt légitime prévu par l’article 61 du Code civil.
Inversement, une personne ayant déjà obtenu un changement de nom de famille par décret peut toujours obtenir un nouveau changement de nom selon la procédure simplifiée.
La saisine éventuelle du procureur de la République
L’article 61-3-1 du Code civil précise qu’en cas de difficultés, l'officier de l'état civil saisit le procureur de la République, qui peut s'opposer à la demande. En ce cas, l'intéressé en est avisé. Cela peut concerne le cas où il existe un doute sur l’existence de filiation à l’égard du parent dont le nom est sollicité.
De même, le procureur de la République du lieu de naissance peut être saisi par le demandeur de changement de nom et ordonne lui-même ce changement de nom.
L’opposition du procureur de la République est contestée devant le tribunal judiciaire selon la procédure contentieuse.
La confirmation de la demande de changement de nom après un délai de réflexion d’un mois
Le demandeur de changement de nom de famille selon la procédure simplifiée doit présenter la confirmation de sa demande. Cette confirmation ne peut pas avoir lieu avant l’expiration du délai d’un mois à compter de la réception de la demande par l’officier de l’état civil.
Les effets du changement de nom de famille selon la procédure simplifiée
L’officier de l’état civil consigne le changement de nom dans le registre de l’état civil.
Une mention de changement de nom sera également apposée sur l’acte de naissance du demandeur.
Le changement de nom entraîne la mise à jour de l’acte de mariage, de l’acte de naissance l’époux ou du partenaire du PACS, de l’acte de naissance des enfants et de l’acte de mariage des enfants le cas échéant.
Le changement de nom selon la procédure simplifiée n’a aucune incidence sur le nom des frères et sœurs du demandeur.
Cependant, l’article 61-3-1 du Code civil prévoit que les effets du changement de nom selon la procédure simplifiées s’étendent aux enfants mineurs ou majeurs du demandeur dès lors que ceux-ci portent le nom ou une partie du nom du demandeur. Il est à noter que la modification du nom des enfants du demandeur n’est pas automatique lorsqu’ils sont âgés à partir de 13 ans. Dans cette situation, leur consentement personnel est requis. La circulaire du 15 juin 2023 précise que ce consentement doit intervenir au plus tard le jour de la confirmation de la demande de changement de nom par le demandeur. Après cette date, les enfants du bénéficiaire ne peuvent plus bénéficier de l’effet collectif du changement de nom. Le cas échéant, ils devront recourir eux-mêmes, à leur majorité, à la procédure simplifiée pour obtenir le changement de leur nom et celui de leurs enfants mineurs, le cas échéant.
II - Le changement de nom de famille fondé sur l’intérêt légitime (dit changement par décret)
L’article 61 du Code civil est un autre fondement légal permettant de changer de nom de famille : « Toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander à changer de nom ».
Il s’agit donc d’une demande conditionnelle : l’intéressé doit prouver son intérêt légitime au changement de son nom de famille.
L’intérêt légitime au changement de nom n’est pas défini par la loi.
Cependant, l’article 61 du Code civil précise que la demande de changement de nom peut avoir pour objet d'éviter l'extinction du nom porté par un ascendant ou un collatéral du demandeur jusqu'au quatrième degré.
Selon La jurisprudence, l’intérêt légitime au changement de nom de famille fondé sur l’article 61 du Code civil sont caractérisé dans les cas suivants (cette liste n’est pas exhaustive) : l’usage prolongé d’un autre nom, le motif d’ordre affectif dans des circonstances exceptionnelles, le changement de nom intervenu après la condamnation pénale d’un frère pour des faits graves.
Les personnes pouvant bénéficier du changement de nom de famille fondé sur intérêt légitime
Le changement de nom fondé sur un intérêt légitime est possible pour toutes personnes, majeures ou mineures.
Cependant, tout changement de nom de l'enfant de plus de treize ans nécessite son consentement personnel lorsque ce changement ne résulte pas de l'établissement ou d'une modification d'un lien de filiation (article 61-3 du Code civil).
Par ailleurs, le parent qui est à l’initiative du changement de nom de famille du mineur doit saisir le juge des tutelles en vue d’obtenir une autorisation afin de déposer la demande de changement. Le juge des tutelles vérifie à cette occasion si le projet de changement de nom est conforme à l’intérêt du mineur. Cependant, cette vérification n’a pas vocation à déterminer si le changement de nom présente un intérêt légitime (voir notamment Cour de cassation, Première chambre civile, 9 septembre 2015, 14-19.876, Publié au bulletin).
La procédure de changement de nom de famille fondé sur un intérêt légitime (changement par décret)
L’autorité compétente chargée d'examiner la demande de changement de nom de famille
La demande de changement de nom fondé sur un intérêt légitime est adressée au garde des sceaux, Ministre de la Justice (article 1 du décret du 20 janvier 1994).
En cas de refus, la décision du Ministre de la Justice, qualifiée de décision administrative, peut être contestée devant les juridictions administratives (le tribunal administratif de Paris en première instance, puis la cour d'appel de Paris en appel et le Conseil d'Etat si le pourvoi en cassation est formé).
Les publicités légales préalables de la demande de changement de nom de famille
Préalablement à la demande, le demandeur du changement de nom fondé sur un intérêt légitime fait procéder à la publication au Journal officiel de la République française d'une insertion comportant son identité, son adresse et, le cas échéant, celles de ses enfants mineurs concernés et le ou les noms sollicités.

Il est à noter que si le demandeur demeure en France, une publication est, en outre, effectuée dans un journal désigné pour les annonces légales de l'arrondissement où il réside (article 3 1 du décret du 20 janvier 1994).

La décision d’autorisation de changement de nom de famille fondé sur un intérêt légitime
L’article 61 du Code civil rappelle que le changement de nom fondé sur un intérêt légitime est autorisé par décret.
Celui-ci est signé par le Premier Ministre.

L’article 61-1 du Code civil prévoit une procédure d’opposition : « Tout intéressé peut faire opposition devant le Conseil d'Etat au décret portant changement de nom dans un délai de deux mois à compter de sa publication au Journal officiel ».
Les effets du décret portant le changement de nom de famille fondé sur un intérêt légitime
Le décret portant changement de nom prend effet, s'il n'y a pas eu d'opposition, à l'expiration du délai pendant lequel l'opposition est recevable ou, dans le cas contraire, après le rejet de l'opposition (article 61-1, alinéa 2 du Code civil).
Le changement de nom fondé sur un intérêt légitime s'étend de plein droit (automatiquement) aux enfants du bénéficiaire lorsqu'ils ont moins de treize ans (article 61-2 du Code civil).
La mention du changement est portée en marge des actes de l'état civil des intéressés, soit d'office, soit à la demande du bénéficiaire du changement de nom, sur réquisition du procureur de la République de son lieu de naissance au vu d'une ampliation du décret autorisant le changement de nom et d'un certificat de non-opposition ou, le cas échéant, d'une copie certifiée conforme de la décision rejetant l'opposition (article 7 du décret du 20 janvier 1994).
III - Le changement de nom de famille en cas d’établissement du second lien de filiation
Au sens de l’article 311-23 du Code civil, lorsque la filiation n'est établie qu'à l'égard d'un parent, l'enfant prend le nom de ce parent. Ce nom de famille est indiqué dans l’acte de naissance de l’enfant. Cependant, si un second lien de filiation est ultérieurement établi pendant la minorité de l’enfant, le nom de l'enfant mineur peut être modifié en prenant en compte cette nouvelle filiation.
Cependant, la modification du nom de l'enfant est seulement possible par déclaration conjointe devant l'officier de l'état civil. Ce qui veut dire que les deux parents doivent s'entendre pour que le changement de nom puisse s'opérer.
Les deux parents peuvent choisir :
- soit de substituer au nom d'origine de l'enfant le nom de famille du parent à l'égard duquel la filiation a été établie en second lieu,
- soit d'accoler leurs deux noms, dans l'ordre choisi par eux, dans la limite d'un nom de famille pour chacun d'eux.
Dans ces cas, le nom de l’enfant est modifié et le changement de nom est mentionné en marge de l'acte de naissance.
IV- Le changement de nom de famille en cas de retrait total de l’autorité parentale
Selon l’article 380-1 du Code civil, en prononçant le retrait total de l'autorité parentale, la juridiction saisie peut statuer sur le changement de nom de l'enfant, sous réserve du consentement personnel de ce dernier s'il est âgé de plus de treize ans.
La demande de changement de nom du mineur est présentée soit par l’autre parent exerçant l’autorité parentale, soit par un administrateur ad hoc, soit par le tuteur du mineur.